Chevtchenko de Guillaume Chapnick

En résumé

La famille Chevtchenko compte trois frères aux trajectoires bien différentes. Antoine, le cadet, vit reclus dans les bois, loin de tout. À la demande insistante de sa mère, il accepte de revenir temporairement pour prêter main-forte à ses frères : leur père, atteint d’une maladie neurodégénérative, a besoin de soins pendant l’absence de leur mère, partie à Winnipeg pour un voyage d’affaires.

Dès son arrivée, Antoine est confronté à la dure réalité de la maladie. Les tensions familiales refont surface, et chacun des fils tente tant bien que mal de trouver sa place dans cette situation délicate, tout en jonglant avec ses propres rêves, ambitions et blessures passées.

Distribution : 5 hommes, 1 femme (rôle pouvant être hors-scène, uniquement entendu en voix hors champ)
Nombre d’actes : 1
Nombre de scènes : 21

Identité

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Fratrie

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Maladie

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Identité 〰️ Fratrie 〰️ Maladie 〰️

Mon avis

⭐⭐⭐

J’ai été touchée par la plume sensible de Marc-André Chapnick, qui parvient à dépeindre avec justesse une famille en pleine adaptation face à la maladie d’un père. Au cœur de cette épreuve, les fils cherchent à redéfinir leur rôle, à renouer avec leurs racines et à trouver un sens à leur présence familiale. L’écriture a une authenticité marquante : on sent le vécu derrière les mots, comme si l’on entrait dans un quotidien réel, à la fois banal et bouleversant — un aspect que j’ai sincèrement apprécié.

Cela dit, certains choix m’ont laissée plus perplexe, notamment la fréquence (à mon avis excessive) des sacres et insultes échangés entre les frères. Était-ce vraiment nécessaire d’en mettre autant pour faire sentir la tension? Je me suis demandé si ma réaction était influencée par ma propre expérience familiale… ou si c’est l’enseignante en moi qui regrettait que ce texte, pourtant accessible et porteur, soit difficile à proposer tel quel à des élèves à cause de ce langage omniprésent. Ce choix a un impact certain sur la recevabilité pédagogique de la pièce.

Un aspect qui m’a tout de même séduite est la dynamique du rythme. Avec 21 scènes réparties sur environ 70 pages, le texte se lit comme un scénario de film : les scènes sont brèves, fluides, visuelles. Ce rythme rapide capte facilement l’attention, ce qui pourrait plaire à de jeunes lecteurs ou comédiens.

J’ai toutefois été déçue par le traitement superficiel de la dimension culturelle annoncée. La famille Chevtchenko est censée porter un héritage ukrainien, mais celui-ci est à peine perceptible dans l’œuvre. Quelques bribes (un poème en ukrainien, une allusion à la guerre…) laissent entrevoir un potentiel identitaire riche, mais celui-ci reste en marge. J’aurais aimé que cet aspect soit davantage exploité, surtout quand il est mis de l’avant dans la présentation de la pièce.

En somme, Chevtchenko est un texte sincère et touchant, au rythme efficace, mais dont certains choix stylistiques et un certain manque de profondeur sur les thèmes identitaires ont modéré mon enthousiasme.

Réinvestissement pédagogique

À mon avis, Chevtchenko peut être explorée en classe de 5e secondaire, notamment en raison de la maturité émotionnelle que demande le sujet (maladie neurodégénérative, relations familiales complexes), mais aussi à cause de certains éléments de contenu plus délicats (consommation de marijuana, alcool, usage répété de jurons — en français et en anglais).

Le texte se prête bien à une lecture critique ou à un projet de mise en lecture/mise en espace, surtout si un travail de réflexion est mené autour du langage.

Savoirs essentiels du PFEQ qui peuvent être exploités par ce texte :

  • Traits distinctifs des personnages (moraux, psychologiques)

  • Caractéristiques historiques et socioculturelles

  • Dialogue

  • Opposition

  • Attitude

  • Unité de jeu

  • Prononciation (pour les moments qui ne sont pas en français)

  • Écriture dramatique

  • Niveau de langue

  • Composition vocale

  • Structure (séquence, ellipse)

  • Dramatisation audio

  • Captation du son

💬 Niveau de langue: Le texte offre une belle occasion d’amener les élèves à réfléchir sur l’usage des sacres et insultes, autant en français qu’en anglais. On peut envisager un travail d’adaptation partielle du texte, où les élèves réfléchissent aux effets du langage sur la réception du message — sans pour autant dénaturer l’intention de l’auteur.

🎙️ Dramatisation audio: Le personnage de la mère peut facilement être représenté en voix hors-champ, une option qui ouvre la porte à l’exploration du jeu vocal ou du travail technique pour les élèves plus timides. Cette approche permet également d’aborder la mise en scène sonore et la gestion des effets audio en direct ou en différé.

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